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L’Europe, bisounours monétaire
20/09/2010 20:49
L’anarchie monétaire
Le Monde n’a pas totalement tort quand il décrit ce climat de guerre monétaire entre les pays pour avoir une parité compétitive et favoriser ses exportations. Beaucoup de pays ont une véritable politique de change visant à soutenir leur croissance et l’emploi. Cela fait partie des statuts de la Fed, et dès les premiers signes de la récession à venir en 2008, la banque centrale étasunienne avait agi vigoureusement pour soutenir la croissance en baissant rapidement les taux (faisant donc baisser le dollar), retardant le démarrage de la récession au 3ème trimestre 2008, trois mois plus tard qu’en Europe.
C’est également le cas de la Chine qui pilote le cours de sa monnaie, le seul grand pays à encore refuser de la laisser flotter. En revanche, le quotidien du soir exagère un peu quand il sous-entend que le Japon pratique une guerre monétaire. En effet, le pays du soleil levant est confronté à une appréciation de sa monnaie sans rapport avec sa vraie valeur et un yen surévalué pourrait maintenir le pays dans la déflation. Du coup, l’action des autorités sur le marché des changes peut être considérée comme légitime étant donné qu’elle ne vise pas à entretenir une sous-évaluation du yen mais éviter sa surévaluation.
L’Europe, dindon de la farce
La zone euro, elle, se retrouve à subir passivement les aléas des politiques monétaires des autres grandes puissances économiques puisque nous n’avons aucun objectif de cours pour l’euro. Alors que l’Union Européenne est la première puissance économique du monde, rien n’est fait pour mener une politique monétaire destinée à soutenir la croissance et l’emploi. C’est ainsi que nous avons subi la politique étasunienne et britannique de dépréciation compétitive avec passivité, nous contentant de regarder les emplois quitter nos pays pour aller en Europe de l’Est ou en Asie.
Il est proprement hallucinant que les dirigeants européens ignorent à ce point les conséquences délétères de la politique monétaire de la BCE et ne cherchent pas à faire quelque chose. La seule solution pour la France est de retrouver son indépendance monétaire afin de défendre ses intérêts. Mais il serait également nécessaire de remettre en place un Système Monétaire International, comme avant 1971, de manière à ce que les Etats puissent agir de manière concertée et ne pas laisser les parités monétaires aux mains des marchés et des Etats qui ont encore les moyens et la volonté d’agir.
Les fluctuations monétaires sont acceptables quand elles permettent d’adapter le cours d’une monnaie à la réalité économique de son pays. En revanche, l’anarchie monétaire actuelle est une calamité, notamment pour une Europe qui a choisi une passivité incompréhensible.
Laurent Pinsolle
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